Adriana Guatame-Garcia, PhD, MSc
- womengeosciencecan
- 27 sept.
- 6 min de lecture

Comment avez-vous décidé de poursuivre vos études universitaires ? Connaissiez-vous la géologie/géosciences avant d’entrer à l’université ?
Lors de ma dernière année de lycée, je voulais étudier la chimie. J’aimais faire des expériences en laboratoire et je ne me voyais pas travailler à plein temps dans un bureau. Je pensais aussi à faire quelque chose de plus en lien avec la nature, et la seule option que j’envisageais était la biologie (même si je ne suis pas très douée dans ce domaine !). Puis, en cours de chimie, nous avons dû réaliser un projet sur les hydrocarbures ; j’ai découvert la géologie et ce que font les géologues, notamment le fait qu’on peut pratiquer la chimie sur le terrain. J’ai été immédiatement conquise !
Décrivez votre parcours professionnel depuis la fin de vos études de premier cycle.
J’ai obtenu mon diplôme de premier cycle en géologie à l’Université Nationale de Colombie, mon pays d’origine (dont je suis extrêmement fière !). La minéralogie et les gisements minéraux étaient mes cours préférés, donc je savais que c’était la voie que je voulais suivre. Je voulais faire un master, alors pendant que je postulais à des bourses (et que j’améliorais mon anglais), j’ai travaillé au Service Géologique (à l’époque INGEOMINAS) dans la division de télédétection, ce que j’ai beaucoup apprécié. J’ai fini par recevoir une bourse du gouvernement néerlandais pour poursuivre un master en télédétection appliquée à l’exploration minérale (une combinaison parfaite) à l’Université de Twente.
J’étais très heureuse de vivre aux Pays-Bas et de faire de la recherche, donc lorsque j’ai vu une opportunité de faire un doctorat à l’Université de Technologie de Delft, je n’ai pas eu à y réfléchir trop longtemps. Mon doctorat en ingénierie des ressources m’a permis de faire le lien entre l’exploration minérale et le traitement des minerais, et j’ai découvert le secteur minier. À la fin de mon doctorat, il était clair pour moi que je voulais continuer dans la voie académique, tout en intégrant la dimension environnementale à mon portefeuille de recherche.
Pour mon postdoctorat, d’abord à l’Université de Delft puis à l’Université Queen’s, j’ai mené des recherches sur la revalorisation, la stabilisation et la réhabilitation des déchets miniers. Déménager au Canada pour travailler à Queen’s est l’une des meilleures décisions que j’ai prises. Je savais que si je voulais avoir un impact dans le secteur des minéraux, je devais me rapprocher de l’industrie, et il n’y a pas de meilleur endroit que le Canada pour cela. Ma recherche d’un poste de professeur m’a menée à Calgary, où je suis maintenant professeure adjointe. Je rassemble mon expertise sur l’ensemble du cycle minier pour créer des solutions d’approvisionnement en minéraux critiques et former les prochaines générations de professionnels.
Si vous pouviez revenir à votre première année de licence, choisiriez-vous le même diplôme et la même trajectoire professionnelle ? Pourquoi ?
Je n’ai aucun regret concernant ma première année de licence. Les choix que j’ai faits à l’époque m’ont menée là où je suis aujourd’hui – et je suis très heureuse. J’aurais pu être plus audacieuse en cherchant des opportunités supplémentaires pour évoluer, comme des stages ou des petits emplois, mais je suppose qu’à l’époque ces opportunités n’étaient pas aussi évidentes qu’elles le sont aujourd’hui.

Quelles sont les trois meilleures choses dans votre travail/carrière ? Quelles sont les trois choses que vous aimeriez changer ?
J’adore absolument travailler dans un environnement universitaire. Ce que je préfère, c’est la diversité des personnes, des idées et des espaces. J’ai la chance d’interagir avec des personnes incroyablement brillantes qui apportent des perspectives très variées à mes recherches – même si elles travaillent dans un domaine différent ! C’est ainsi que naissent la créativité et l’innovation.
La deuxième meilleure chose, c’est la possibilité de superviser, former et encadrer des étudiants. Partager mes recherches et mes connaissances avec une nouvelle génération de professionnels est à la fois un honneur et une responsabilité. Enfin, c’est la possibilité d’avoir un impact grâce à mes recherches. À l’université, nous avons l’opportunité de collaborer avec divers acteurs et d’appliquer nos idées dans le monde réel.
Il y a beaucoup de choses que je changerais dans le milieu académique, mais c’est une conversation à avoir dans un autre cadre (ha ha).
Dans mon expérience de collaboration avec l’industrie, j’ai constaté beaucoup de réflexes conservateurs et une tendance à jouer la carte de la sécurité. Cela freine considérablement l’innovation au sens large. À ce moment critique de l’histoire, avec l’urgence de fournir des ressources minérales de manière durable, c’est une attitude que nous ne pouvons plus nous permettre.
Nous devons aussi devenir de meilleurs communicants. Une grande partie de la mauvaise réputation du secteur minier vient d’une communication insuffisante avec les autres parties prenantes et, surtout, avec les communautés. Il y a également une certaine arrogance et une tendance à s’approprier la vérité, ce qui rend les discussions sur des sujets complexes (comme les impacts environnementaux et sociaux) très difficiles.
Pourquoi l'égalité entre les genres dans l’exploration minérale, l’exploitation minière et les géosciences est-il importante pour vous ?
Au-delà de la simple recherche d’une équité entre les genres, je crois que la diversité de genre – ou la diversité en général – est absolument essentielle. Parfois, l’équilibre est mesuré uniquement en chiffres, ce qui ne garantit pas nécessairement une véritable représentation. Il faut s’assurer que les voix diverses soient non seulement entendues, mais aussi qu’elles disposent des espaces et des mécanismes nécessaires pour prendre des décisions, influencer les autres et générer un impact. Bien que certaines initiatives visent à créer des environnements plus inclusifs et diversifiés, beaucoup restent purement symboliques. Nous devons faire preuve de plus d’honnêteté et d’intention pour provoquer un véritable changement.

Pourquoi cela devrait-il être important pour tout le monde ?
Parce que tout le monde y gagne ! Il existe suffisamment de preuves que les équipes diversifiées en termes de genre, de culture, de compétences, etc., obtiennent de meilleurs résultats. Les personnes qui travaillent dans un environnement où elles se sentent à leur place sont plus enclines à « porter le maillot de l’équipe », comme on dit en Colombie. Cela signifie être pleinement engagé·e et prêt·e à faire des efforts supplémentaires. Ne préférons-nous pas tous travailler dans un lieu sûr, respectueux, et où chacun·e est valorisé·e ?
Quel conseil donneriez-vous aux jeunes femmes qui débutent une carrière dans l’exploration minérale, l’exploitation minière ou les géosciences ?
Trouvez quelques bons mentors et parrains/marraines* à différents stades de carrière et dans des domaines variés. Ils vous offriront une vision honnête de la profession, partageront des conseils précieux et vous ouvriront des portes.
Prenez aussi le temps d’apprendre les compétences en leadership (aussi appelées compétences douces). De nombreux environnements peuvent être intimidants pour les jeunes femmes dans un monde encore largement dominé par les hommes. Cela peut être encore plus difficile si vous ne maîtrisez pas la langue de travail, si vous avez la peau colorée, si vous êtes autochtone, etc. Ces compétences renforceront considérablement votre confiance et vous prépareront à réussir.
\* Une personne qui utilise son influence pour vous soutenir et plaider en votre faveur.
Qu’est-ce qui vous motive et vous occupe en dehors de l’exploration minérale, de l’exploitation minière ou des géosciences ?
Même si ce n’est pas totalement en dehors des géosciences, je suis très passionnée par le travail bénévole que je fais avec GeoLatinas, une organisation communautaire qui vise à inspirer et à autonomiser les femmes latino-américaines poursuivant des carrières en sciences de la Terre et des planètes. Je suis active au sein de cette organisation depuis 2019, en travaillant sur des initiatives qui fournissent des outils et des ressources pour aider les membres à réussir à toutes les étapes de leur parcours (étudiantes, scientifiques, industrie, etc.). Je pourrais parler de GeoLatinas pendant des heures, mais pour l’instant, je vous laisse le lien vers notre site web si vous êtes curieux·se : https://geolatinas.org
J’aime aussi rentrer chez moi et faire des câlins à mes chats, Luna et Tinto – et à mon mari, bien sûr ! Dernièrement, je me suis mise aux puzzles 😊






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